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Une enquête nationale sur la Lecture à l'hôpital a été lancée en France en 1992. Le texte présente, grâce à quelques chiffres indicatifs, les résultats de cette enquête : ils démontrent qu'il y a un réel besoin d'information et de lecture à l'hôpital, et que l'institution hospitalière a pri s conscience d'un tel besoin. Le bibliothécaire représente donc l'intermédiaire idéal entre le patient hospitalisé et l'information. Choisis parmi de nombreux exemples, deux cas particuliers viennent étayer cette assertion : une bande dessinée destinée aux enfants leucémiques et le cas de la lecture en milieu gériatrique.
La lecture à l'hôpital marque ses origines, en France, en 1634 sous le vocable de "distraction des malades". Il fallut attendre deux siècles (1845) pour que des mesures concrètes soient prises en faveur de son développement, et ce n'est qu'en 1947-1948 que circulaires et arrêtés du ministère de la Santé publique instituèrent l'o bligation de créer une bibliothèque et d'y consacrer des crédits.
Il reste que, dans l'histoire de l'hôpital, cette pratique culturelle, développée majoritairement par des associations caritatives et un bénévolat de plus en plus organisé, se heurte à une disparité, voire à une pauvreté de moyens dans nombre d'établissements hospitaliers. Mais l'offre de lecture s'inscrit de plus en plu s largement dans la vie des établissements hospitaliers : cela signifie donc pour le patient la possibilité d'être mieux informé, et pour le bibliothécaire un rôle de plus en plus affirmé dans cette émancipation des malades et dans leur droit d'accéder à plus d'informations.
Autrement dit, 90,6% des lieux de lecture sont accessibles aux malades. Le problème de l'accès au livre s'est toujours posé de façon particulièrement aigüe à l'hôpital, enraison des difficultés de déplacement qu'éprouvent certains malades. 70% des établissements proposent an accès direct et 30% un accè ;s indirect, c'est-à-dire offrent aux malades la possibilité de choisir les ouvrages sur une liste ou sur un chariot dans leur chambre même. Relativement développé dans les centres de moyen et long séjour où les malades ont souvent des problèmes pour accéder à la biblioth&eg rave;que, ce service est réduit dans les centres spécialisés en psychiatrie. Quant au prêt en chariot, s'il est quantitativement moins fort, il conserve qualitativement une valeur symbolique que les chiffres ne peuvent mesurer, mais qui est clairement indiquée par les témoignages.
Voici deux exemples significatifs, concrets, qui démontrent le rôle éminent joué par le biblitothécaire au sein de l'institution hospitalière pour développer l'accès à la lecture, et donc, à l'information.
Le support image-histoire avec lequel l'enfant s'identifie totalement concrétisera la "visualisation positive" pour permettre à l'enfant de trouver à l'intérieur de lui-même l'énergie, la force et le courage; il polarisera son attention sur une offensive personnelle : l'enfance face au mal. Il s'identifiera à Pascal et Caline, les deux héros de la bande dessinée, qui luttent contre Leukemia.
L'impact de la bande dessinée : après environ six mois de fonctionnement, la bande dessinée répond à certains espoirs. On peut situer son efficacité à divers niveaux : - celui de l'enfant malade : grâce aux dessins expliquant les divers examens (ponction lombaire, pansement du cathéter), comme celui du chat qui fait le gros dos, l'enfant sait ce qui va se passer, ce qu'il a à faire et a moins peur. Il prend partie dans ce combat qu'il mène avec sa famille et son équipe soignante. Pour certains enfants, la bande dessiné e représente "le copain" quand il est hospitalisé.
- celui des parents et de la famille : la bande dessinée sert de point de repère dans la chronologie des examens et du traitement. On s'y replonge régulièrement. Les images complètent et illustrent le discours du médecin. Elle sert de lien entre l'enfant malade et ses frères et soeurs. L'enfant malade qui rentre à la maison est content e t fier de montrer à ses frères et soeurs ce qu'on lui a fait. Les frères et soeurs peuvent ainsi comprendre et participer à leur façon.
La question de la lecture pour les personnes du troisième âge a déjà donné lieu à des recherches. En 1989, le ministère de la Culture publiait "Un nouvel âge pour lire". Dans cette étude, on trouvait un témoignage qui résume la situation rencontrée dans la plupart des services de gériatrie.
Le milieu gériatrique : en institution gériatrique, comme partout ailleurs, la lecture suppose vouloir, pouvoir et ...savoir lire. Ces conditions, malheureusement, sont trop souvent absentes dans les tranches de population nées au début du siècle, qui forment en 1989 la majorité des personnes hébergées ou hospitalisées dans les servi ces de gériatrie.
La politique de maintien à domicile, l'amélioration générale de l'état de santé, l'allongement de la durée moyenne de vie font que, actuellement, les établissements, maisons de retraite ou services gériatriques, accueillent des personnes de plus en plus âgées : 5% des plus de 60 ans vivent en institution. Ces personnes s ont physiquement diminuées, rarement aisées et toujours seules. Cette population ne constitue pas, il est vrai, un groupe homogène. Prédomine tout de même une origine socioculturelle défavorisée. Les métiers exercés ne facilitant pas la lecture, une notion de loisirs peu répandue (lire étant considéré comme une perte de temps) et, bien sûr, une fréquentation scolaire insuffisante.
Par ailleurs, le vieillissement en institution accentue le repli sur soi, provoque des abandons successifs liés aux dépressions et à une désorientation spatio-temporelle. L'accès au livre, proprement dit, n'est pas toujours facilité : les livres proposés ne correspondent pas aux besoins. Ce qui est en cause, c'est la typographie, le poids, la tai lle et la maniabilité de l'ouvrage. Comment une personne hémiplégique, par exemple, pourra-t-elle tenir son livre en main?
L'importance de la relation personnelle : certes, on dispose aujourd'hui de livres-cassettes. Malheureusement, cette forme nouvelle de lecture, si intéressante soit-elle, n'est pas adaptée à la personne âgée vivant en institution. La cassette demande un effort de concentration trop important. Seule, elle n'est pas suffisamment vivante, suffisamment stimulante, et la présence physique d'un lecteur s'avère le plus souvent indispensable pour soutenir l'attention de l'auditeur. Sur le plan pratique, il faut également manipuler cassette et magnétophone qui sont des outils relativement contemporains, en tout cas étrangers aux personnes âgées. Celles-ci doivent disposer d'une chambre individuelle pour ne pas gêner les voisins, ou acquérir un baladeur... En fait, bien des difficultés restent encore à surmonter.
Déficits physiques et déficits affectifs sont difficilement compensés. Citons simplement les déficits visuels, handicap majeur s'il en est. Il existe aujourd'hui, pour les personnes souffrant de déficiences de la vue, des livres dits à large vision. Dans ce domaine, un effort énorme a été réalisé ces dernières années. La lecture en tant que telle ne correspond pas à un besoin fondamental chez l'homme, ni à une activité spontanée. Elle nécessite une éducation ou tout au moins une initiation. Or, le manque de stimulations à la lecture reste encore trop fréquent. Quels sont les rapport des personnels soignants à la lecture? Lisent-ils? Aiment-ils p arler de leurs lectures avec les personnes âgées? Autant de questions dont on ne peut éluder l'importance.
De la même manière, les personnes chargées des bibliothèques en établisements ne sont pas toujours suffisamment attentives aux besoins des personnes âgées. Il est nécessaire de bien connaître la personne à qui l'on s'addresse, ses goûts, ses aptitudes. Il est préférable de converser quelque peu avant de reco mmander un livre. Le besoin de communiquer : quelques précautions sont à prendre pour établir un meilleur contact avec la personne. Il est bon de parler lentement, avec précision, expliciter, ne pas hésiter à répèter si besoin est. Il faut aussi avoir une bonne connaissance de l'ouvrage qui est proposé pour éventuellement en faire un ré sumé ou en discuter avec le lecteur. Si les résidants lisent d'eux-mêmes, s'ils choisissent leurs lectures, il suffit alors de leur apporter un éventail de livres suffisamment large pour qu'ils puissent opérer ce choix.
Jean-Philippe ACCART